Enfin du culturel et de l'archéologie


Ce matin, après un réveil loupé pour toutes les deux, nous avons petit-déjeuné en vitesse pour être à l'heure au colloque. Début à 10h, ça n'est pourtant pas très tôt... Hélas trois fois hélas, l'emblème de ce colloque désastreux nous attendait impitoyable :

Cancelado (annulé) : le leitmotiv du XVIème congrès de l'Union Internationale des Sciences Préhistoriques et Protohistoriques

Sessions annulées. Autant celle de Mathilde que la mienne. Un seul des intervenants sur l'archéologie des milieux arides qui m'intéressait s'est présenté, et il a refusé de parler seul face à 9 personnes.  C'était franchement ridicule. 
Nous essayons de passer le temps en faisant un saut au musée de l'indien (qui s'avérait être le musée ethnologique de l'université) malgré les infos obtenues auprès de diverses personnes nous disant qu'il était probablement fermé (pour cause de réhabilitation semble-t-il). Bilan : c'était vrai, portes closes.

Vous avez dit "dépitées" ??
Le planétarium est fermé aussi pour cause de grève sur le campus. Nous avons donc erré vers la section des sciences humaines où une petite librairie bien sympathique nous attendait et un snack pour nous restaurer sur le pouce. Au passage, le capuccino brésilien agrémenté de dulce de leite, c'est sucré et écœurant, rien à voir avec un capuccino!!

Nous revenons vers le coeur névralgique des conférences, à savoir le centro de eventos, où nous trouvons Christelle Lahaye en pleine lecture sur les canapés. Nous papotons un moment avant la reprise des sessions de l'après-midi. Mathilde accompagne Christelle à une session majoritairement francophone sur le feu et la préhistoire. Quant à moi je croise les doigts pour que ma session sur les mégalithes soit maintenue... Suspense... Oui !! La plupart des intervenants sont là et j'ai enfin droit à 4 mini-conférences de qualité sur le mégalithisme du Brésil central, du nord du Brésil, du centre du Portugal et du nord de l'Inde. C'était vivant et passionnant, ouf au moins je ne serai pas venue pour rien. 
Un des sites mégalithiques de l'Amapa (nord du Brésil)
Céramique marajoara et descente du soleil sur un mégalithe lors du solstice de décembre (détail de la photo précédente)
Grâce aux connaissances que nous avons fait auprès du staff avec force sourires et gentillesses, nous arrivons à obtenir en 2 tentatives deux sacs et un lot de crayons et cahiers à l'effigie du colloque (réservés normalement aux personnes ayant payé leur inscription). Au moins nous pourrons fièrement nous promener avec la preuve éclatante que le pire congrès international jusqu'à nos jours a bien eu lieu et que nous y étions!!

On s'engouffre dans un taxi en direction de l'hôtel et comme il n'a pas plu depuis ce matin (oh miracle!) je prends quelques photos sur le trajet, en espérant que le soleil prévu pour demain nous permette de meilleures vues de la ville.

Florianopolis et sa baie
Vue depuis l'hôtel - A droite : pont Hercilio Luz

Courte halte à l'hôtel avant d'embarquer Gilbert direction le musée de l'homme de Sambaqui, situé à l'intérieur d'un collège jésuite. La collection est apparemment très importante mais les visites ne se font qu'en semaine et seulement sur rendez-vous l'après-midi. Grâce à notre gentille réceptionniste bilingue du Mercure nous avons eu rapidement notre rendez-vous avec le professeur Sydney, l'archéologue en charge du musée. L'accès avec Gilbert s'est fait par une salle de classe déserte, ceci pour rejoindre l'ascenseur et le musée au dernier étage. Sols et meubles en bois ciré, ça sent bon le musée de l'ancien temps. Notre hôte est un archéologue dans la veine des anciens religieux créateurs de cabinets de curiosité. Il nous prenait de temps en temps pour de gentilles françaises un peu nunuches en nous posant des questions crétines ou en sous-entendant des différences linguistiques et culturelles infranchissables. Mais l'un dans l'autre, on a réussi à comprendre ses explications en portugais (notre oreille s'améliore y'a pas de doutes) et à lui répondre en espagnol.

Vue générale du musée et des céramiques tupi gurani

Sépulture double sambaqui d'un homme et d'un bébé posés à plat ventre
Globalement la visite a quand même été instructive, on sent le bonhomme passionné par sa collection et par le fait de parler d'elle (sachant que ça va de l'ethnologie à la malacologie en passant par l'archéologie et la taxidermie). Sauf que le monsieur a certainement perdu un petit quelque chose en route depuis qu'il occupe les combles cirés... Parce que certaines remarques et réflexions étaient limite flippantes. La façon dont il illustre la différence fondamentale entre anthropophagie et cannibalisme : l'anthropophagie c'est manger son ennemi pour s'attribuer sa force selon une pratique rituelle; le cannibalisme, c'est comme s'il nous tuait, nous mettait dans son congélateur et nous boulottait de temps à autre quand l'envie lui en prend, en gros ça relève de la maladie mentale... Mouais mouais mouais, j'aurais pas exactement choisi cet exemple là...

Une jeune femme s'est jointe à nous à mi-parcours et a très vite été remise dans le rang : on ne visite pas toute seul mais on suit le guide pas à pas, il est hors de question de déambuler à travers les vitrines propres et nettes. D'ailleurs moi qui ai tenté la visite à pied avec une seule béquille, j'ai bien senti le moment où il allait m'obliger à la poser parce qu'elle venait de tomber deux fois par terre (prise de photo oblige...). La première fois, grand seigneur, il a laissé passer car il m'a dit que je n'avais pas fait exprès. Mais la deuxième fois était de trop. Heureusement qu'il a vu que ce n'était pas un accessoire de beauté mais bien une canne de marche dont j'avais besoin, du coup il a laissé tomber son impulsion première de me la faire poser dans un coin. Monsieur est tatillon, pas peu fier de son emploi et sans doute un peu maniaco-dépressif, mais il colle bien dans le paysage. Il m'a par ailleurs conseillé de boire beaucoup d'eau pour guérir de mon rhume (il parait qu'il n'a pas plu comme ça depuis 1974, c'était sans doute pour fêter notre venue à Floriano!) et partage avec nous son reste de pâte de fruit à la goyave (c'est sensé m'aider aussi, j'en doute mais bon j'avale). 

La visite s'est clôturée par les vêtements liturgiques des différents religieux qui ont enseigné au collège (et dont les portraits trônent avec une fierté académique un peu morbide sur les murs du rez-de-chaussée). On lui avait pourtant dit que nous n'étions pas catholiques, mais après une première résignation, il est revenu à la charge et nous a quand même donné des explications dont personnellement je me serais bien passée. Il était temps d'en finir...

Une grosse heure s'était écoulée et il s'est souvenu qu'il avait rendez-vous chez le dentiste. Du coup il prend sa brosse à dent, l'enduit de dentifrice et s'en va se laver les dents dans les toilettes tout en continuant à discuter avec l'autre visiteuse. Surréaliste!! Et nous qui luttions contre la crise de rire! Il en finit avec ses dents et demande un peu d'aide pour fermer les nombreux volets des petits fenêtres. Après quoi un dernier obstacle nous attend : la salle de classe, alors occupée par une enseignante et ses élèves, et qu'il nous faut franchir en sens inverse. Sauf qu'aucune percée n'est plus visible parmi la marée de pupitres! L'archéologue demande poliment la permission à l'enseignante d'interrompre son cours pour laisser passer notre petit convoi, avec l'excuse suprême de la chaise roulante -à laquelle une bonne âme charitable ne pourrait tourner le dos. C'était irréel et drolissime vraiment de voir tous les élèves se lever, nous observer les uns avec curiosité les autres avec le sourire aux lèvres, déplacer leurs tables et chaises et nous regarder passer tels une délégation officielle en parade sous des lumières soudain trop vives. On avait franchement envie d'éclater de rire tellement la situation était énorme, j'avoue que même mes joues en ont chauffé quelque peu!!
Ah, en voilà une visite de musée dont on se souviendra! A l'image du Brésil, un peu décalé et pas facile d'abord, mais sans regret d'y être allé.

~

Encore une journée des plus folles avec des annulations, des rajouts, des communications dont le niveau laisse à désirer pour un congrès international. International que de nom car la majorité des communicants sont brésiliens et les communications en anglais sont une espèce rare. Heureusement que nous n'avions pas payé l'inscription ! En tout cas je sais ce qu'il ne faut pas faire et je ne reviendrai pas à un colloque organisé au Brésil !

Heureusement également qu'il s'est arrêté de pleuvoir et que nous sommes au Mercure car je n'imagine même pas la même chose dans notre auberge de jeunesse non chauffée, non isolée, difficile d 'accès et loin du centre. Florianopolis restera une expérience mémorable. Nous avons eu de nombreuses crises de fou rire.

Demain nous allons devoir patienter et entamer notre voyage de retour. Puisque nous avons vu tout ce que nous pouvions voir dans Floripa tournant autour de l'archéologie ou de l'ethnologie nous nous rabattrons sur les boutiques pour dépenser les sous que je n'ai plus. Et oui, pour couronner le tout, on a pirater ma carte et dépenser à peu près 900 €. Mais au moins nous avons tous nos bagages depuis le début alors que une de nos professeurs venues assister au congrès attend encore son bagage depuis dimanche dernier !!! Nous pensions créer le club de la poisse de Bordeaux !! Mieux vaut en rire mais sur le coup, ça fait tout drôle.

Bon après un bon chocolat chaud direction la couette !



Commentaires

  1. Donc, le retour s'amorce.
    Vous avez du rencontré le professeur Tournesol dans ce musée. Etait-il bien réel ?
    J'ai l'impression que les Brésiliens sont plus doués pour le carnaval ou la samba que pour organiser des colloques.
    Cela reste tout de même un beau pays.

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