Dimanche 04 septembre 2011


 Ce matin le réveil a été très matinal, 6h… Pour une fois je dormais comme un loir, j’ai eu du mal à me lever. Pourtant le programme devait être tenu : petit-déjeuner dans notre appartement de luxe, séchage de la lessive d’hier soir au sèche-cheveux, check-out à la réception et demande de taxi (les réceptionnistes sont adorables mais un peu longs à comprendre). En 5 minutes nous étions à la gare ferroviaire (également gare des bus) où les agents nous ont pris en charge avec Gilbert : doublage dans la file, installation dans un wagon avec une place spéciale handicapé où nous avons le double d’espace, pratique pour stocker le fauteuil et les sacs à dos. La majorité des voyageurs effectue le voyage aller-retour en train dans la journée. Mais comme nous avons décidé de passer la nuit à Antonina (8 km de Morretes) nous avons tous nos bagages avec nous.


Le trajet a duré 4 heures au lieu des 3 heures annoncées, mais nous avions été prévenues par le propriétaire de la pousada qui devait venir nous attendre à l’arrivée. Dans le train les paysages de la forêt atlantique s’observent de près, ça change après la vision à travers les vitres des bus. Ici on peut ouvrir les fenêtres et se pencher (à condition de regarder ce qui vient devant, gaffe aux branches et autres obstacles), passer d’un côté à l’autre car le compartiment est à moitié vide, et discuter avec la guide multilingue et épatante qui n’a pas arrêté de nous communiquer ses connaissances et son enthousiasme.

Finalement ces billets en classe tourisme ont été une très bonne chose. Ca nous a permis d’avoir des commentaires utiles (même en français car Nancy notre guide quinquagénaire parle aussi notre langue) autant sur la forêt que sur l’Etat du Parana. Nous avons pu voir que l’intégration sociale est au cœur de la société brésilienne, tout du moins dans cette région, où au grès de l’histoire se sont succédés immigration avec octroi de terres, travailleurs contemporains (notamment dans le secteur automobile) et globalisation (Carrefour et autres grands groupes mondiaux). La présence dans notre compartiment d’une famille lyonnaise a confirmé que les expatriés étaient bel et bien là. Nous avons également appris l’existence d’un système de tri sélectif incluant les populations les moins favorisées qui reçoivent des tickets de bus gratuits en échange du tri (d’ailleurs les favelas sont ici diplomatiquement appelées installations irrégulières) et avons vu une prison à ciel ouvert où les détenus travaillent pour l’agriculture biologique.

Car dans cette zone la conscience écologique est omniprésente : champs entiers sont interdits aux pesticides pour ne pas polluer l’abondant système hydrique, classement de territoires en zones naturelles pour éviter les installations ou constructions invasives, et même tri des déchets à bord du train puisque nous avons trier les restes du snack qui nous a été servi pendant le trajet. Vraiment cette attitude est remarquable, tout comme l’extrême attention portée aux personnes handicapées (je n’ai jamais vu un pays aussi équipé en infrastructures et en main d’œuvre de service).

Notre guide nous a également montré un morceau de l’arbre embauba, dont la partie haute du tronc est creuse et cannelée. C’est un bois très léger que colonisent les fourmis (sans pour autant malmener l’arbre) et dont les feuilles sont consommées par les paresseux (seuls capables à les digérer en raison de la forte présence de tanins). 


La forêt atlantique, faussement appelée mata atlantica (bois atlantique) par les brésiliens, recèle quantité d’espèces d’arbres, de plantes et d’animaux (tamanoirs, colibris, singes, panthères…). En fait un bois est un espace contenant peu d’espèces et beaucoup d’individus alors qu’une forêt présente de nombreuses espèces avec peu d’individus de chaque. Il reste au Brésil seulement 7% de la forêt atlantique originelle, et près de 5% se trouve dans le Parana. D’où la prise de conscience locale de la nécessité de protéger et de mettre en valeur cet environnement d’une diversité exceptionnelle.

Avec le train nous sommes passées le long de torrents, en surplomb de parois rocheuses, à travers des tunnels taillés dans la roche et sur des ponts vertigineux. Les hauts sommets (le plus haut s’élève à 1500 m) se découpent nettement sur l’horizon. L’à-pic est parfois saisissant car les rails permettent de passer au plus près du vide. Et la lenteur du convoi permet d’apprécier pleinement la richesse de la végétation. 


Nous avons croisé un train de marchandises et avons attendu que ses nombreux wagons (j’en ai compté environ 90 !) finissent de passer pour reprendre notre route. Le soleil était une fois de plus au rendez-vous - une chance visiblement car le trajet semble souvent brumeux- et a donné à la forêt de multiples teintes de vert, et aux broméliacées et autres fleurs des couleurs rouge et rose de toute beauté. 











Finalement nous atteignons la gare de Morretes, remercions chaleureusement notre fabuleuse guide (et en tant que guide professionnelle je sais reconnaître un guide exceptionnel quand j’en croise un !) et faisons la connaissance de Nicolas, le propriétaire de notre pousada. Après explications et conseils, il nous conduit à la banque dans son combi puis nous laisse dans Morretes alors qu’il part déposer nos bagages à Antonina.

La ville est toute modeste et sillonnée de badauds. Une rivière la parcourt, bordée d’espaces verts et de nombreux restaurants. Les boutiques d’artisanat mentionnées dans le Guide du routard sont avant tout des boutiques pour touristes. L’artisanat est parfois local (tissage de feuilles de bananiers, broderies…) mais aussi largement en provenance des usines asiatiques. Nous trouvons une ou deux petites choses à notre goût (dont pour moi une céramique d’inspiration amérindienne avec ce que je crois deviner être des grenouilles et des serpents). Nous avons également suivi les conseils de Nancy, de Nicolas et de la charmante hôtesse de l’office de tourisme (heureusement que la langue des signes marche bien parce que rares sont les employés qui parlent anglais) et nous nous sommes attablées au restaurant Terra Nossa où nous avons goûté le barreado, le plat local composé de viande de bœuf cuite 24h à l’étouffée, servie avec une sauce à la viande, du riz, de la sauce à l’ail, de la farine de manioc, une purée de patates avec crudités, des clémentines et des bananes. Le tout posé sur la table et à mélanger allégrement. C’était bon et extrêmement rassasiant, ça tombait bien j’étais affamée. Il ne manquait plus que le petit verre de cachaça, apparemment à prendre après le repas pour digérer.

Nous avons ensuite continué notre balade dans Morretes sans trop nous attarder, passant à côté de la petite église aux murs jaunes et arrivant près de la gare où deux taxis attendaient d’hypothétiques clients. 


Notre chauffeur se trompe de chemin pour la pousada, empruntant un sentier qui nous semblait un peu étroit pour une entrée d’hôtel, m’enfin… Voyant qu’il s’était trompé il en est arrivé à nous demander où était la bonne entrée… Il suffisait de suivre les panneaux, donc c’est sans autre complication que nous sommes arrivées dans les jardins de la pousada où nous ont rejoint Nicolas et son épouse. Nous nous installons dans notre cabane où l’eau arrive de la source et le hamac nous tend les bras. La nuit est en train de tomber, Mathilde se balance sur le hamac avec son magazine et les moustiques s’acharnent sur nos peaux goûteuses. Enfin un peu de calme après ses journées d’agitation. Demain nous prendrons probablement un bus matinal pour Paranagua, nous rapprochant de la côte et de l’activité portuaire.

Il semble que nous soyons parties depuis des semaines. La déconnexion a été radicale pour moi, sans doute l’effet mélangé de l’excitation du retour en Amérique du Sud, de la découverte d’un nouveau pays, d’une nouvelle langue à explorer, de l’objectif du colloque et d’un gros besoin de prendre l’air.

Juste à l’instant un colibri est venu se poser près de nous, ces oiseaux affectionnant particulièrement l’arbre aux fleurs rouges qui est à côté de notre terrasse. C’est le bruit des ailes qui m’a alerté, leur frémissement rapide ressemble à un mini-hélico. C’est trop mignon !

Ce soir comme vous vous en doutez nous n’avons pas de wifi pas plus que de réseau de téléphone mobile. Juste le bruit des insectes, des automobiles sur la route voisine et bientôt j’espère celui des grenouilles qui viendront certainement à la tombée de la nuit. J’ai bien envie d’aller explorer le jardin avant qu’il ne fasse trop noir…





Commentaires

  1. Enfin vous parlez d'animaux.
    Les photos vues du train sont impressionnantes et la pousada a l'air super agréable.
    Beaux souvenirs en perspective!

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  2. salut les filles
    Nous suivons votre périple régulièrement, dommage que le temps ne soit pas avec vous, il faut faire avec, et vous avez raison de rechercher des hôtels confortables. Les photos de votre voyage montrent un beau paysage, j’espère simplement pour vous que le temps s’améliore

    bises à vous 2

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